SARAH ILLOUZ ET MARIUS ESCANDE au moulin de Moussaron

Moulin de Moussaron

C’est une tour cylindrique de moulin à vent classique. Ce n’est que vers la fin du XXe siècle qu’il a été équipé avec des ailes Berton.

La famille de Gélas a possédé le moulin de Moussaron dès avant 1600. En 1614 et en 1618, dans le livre violet, il appartient à André de Gélas . Par un acte d’afferme conclus à Flaran le 18 juin 1633 incluant des travaux, on apprend que « …des meules seront transportées de Moussaron à Flaran.« 

En 1684, François de Gélas, marquis d’Ambres déclare que le moulin est à l’état d’abandon :« Plus une masure de moulin  à vent  terres vignes et bousigue appelée au Buquet … ».

En 1700, tous les biens de Moussaron sont vendus au sieur Bezian, son régisseur, par François de Gélas Marquis d’Ambres qui préférait vivre dans son marquisat. Après près d’un siècle de possession de Moussaron par cette famille, Jean-Claude Bezian décède en 1787 sans descendance mais après avoir légué ses biens à son cousin germain, Jean-Claude de Lustrac.

Ensuite, on ignore par quelle voie, mais on sait que la possession de Moussaron passe du fils de Jean-Claude de Lustrac à Pierre Courtade Quissac dit de Moussaron.

La famille de Pierre Courtade de Moussaron occupe le domaine pendant le XIXe siècle jusqu’en 1887.

En 1956, la Société civile immobilière de Moussaron Condom achète le domaine et donc le moulin avec.

A la fin du XXe siècle, le père du docteur Doazan  a restauré entièrement le moulin, avec des ailes Berton, lui rendant son réel potentiel de mouture qu’il n’avait plus connu depuis bien des décennies. Avec l’aide d’Antoine Bragagnolo, artisan-menuisier condomois, un véritable périple débute en 1996. André Doazan va visiter des moulins, comme ceux du Lot-et-Garonne. Il étudie des rapports sur leur restauration. Mais c’est en… Maine- et-Loire, au Nord d’Angers, que le passionné fait une rencontre déterminante: « J’ai trouvé une entreprise spécialisée dans la réparation des moulins. Grâce à ses conseils, de nombreuses pièces ont été achetées. » André Doazan ne peut pas compter, il est vrai, sur la mémoire des locaux: « Voici 30 ans, j’ai demandé à des octogénaires de l’époque s’ils l’avaient déjà vu tourner. Personne ne s’en souvenait. C’est normal: les moulins du Sud-ouest n’ont plus été utilisés à partir de la moitié du XIXe siècle. »

Terriers A M Condom 1 CC 9 fol 5 / 1 CC 11 fol 227 / 1 CC 27 Actes Notariés – AD 32 / 3E 5359 du 04-05-618

/3E 5083 du 16-05-1620 / 3E 5084 du 22-05-1621 / Le 20-03-1700 de de Rizon / 3E 5567 du 19-03-1700 //

SARAH ILLOUZ ET MARIUS ESCANDE

SARAH ILLOUZ ET MARIUS ESCANDE
Nés respectivement en 1997 et 1994 en France, vivent et travaillent à Bruxelles.
https://www.sarahillouz.com/
Iels travaillent en duo depuis 2021, suite à leur rencontre lors d’une résidence aux Maisons Daura à Saint-Cirq-Lapopie (Lot, France) en 2021. Sarah est diplômée de Duperré, Paris, en design textile (2018) et de la Villa Arson, Nice (2022). Marius est diplômé de l’ERG, Bruxelles, en installation/performance (2022).
Sarah Illouz et Marius Escande explorent la sculpture, l’installation, l’art textile et les arts numériques. Iels conçoivent des dispositifs, des façons de vivre, de se connecter et de penser ensemble, des façons d’habiter et des façons d’apprendre avec les autres et de manière locale. Leur travail s’articule autour de questions écologiques et socioéconomiques,
afin d’intégrer une conscience critique dans les processus de création.
Iels mettent en pratique une circularité et un réemploi exhaustif des matériaux où chaque chute est utilisée, trouve une nouvelle fonction et se dote d’un surplus d’existence. Leur leitmotiv : good things take time, induit la nécessité de prendre le temps d’assurer la qualité de leur création dans les lieux investis. Les transpositions plastiques leur permettent aussi d’explorer le récit historique dominant et la formulation de mythes communément admis, dans un va-et-vient entre différentes versions et  réactualisations contemporaines.

Good things take time (Recto) 2022
Nous n'habitons vraiment que les choses (?!.) | 2022 |
Magma 2021

Passer au bleu

Début du voyage des pins du château du Luc
En chemin vers le moulin
Arrivée à destination
Début de la mue: l'écorçage
Marius à la manoeuvre
Les pins s'inscrivent dans le paysage

Sarah Illouz & Marius Escande investissent le site du Moulin de Moussaron. L’espace extérieur et les arbres morts du château du Luc leur donnent des idées (et des ailes) qu’ils abordent avec jubilation. Leur projet fait écho tant à la situation topographique du moulin, marqueur du paysage, qu’à sa dimension métaphorique, pointant vers le ciel ses ailes aujourd’hui vaines disant l’oubli d’un monde. Deux pins secs sur pied montent la garde au Moulin de Moussaron. Ils ont été délicatement coupés afin d’être re-plantés de part et d’autre du moulin. En ville, aujourd’hui, le bleu est souvent très peu présent pour d’autres raisons que la signalétique ou la publicité. Ici, sur la colline,
quand le ciel est dégagé, il est omniprésent.
Dans un hommage au patrimoine local et pour jouer avec ce contexte, les deux arbres sont peints intégralement avec le bleu pastel emblématique de Lectoure. Par beau temps, ils disparaissent subtilement dans le bleu du ciel, et réapparaissent quand il est nuageux.
La mort des arbres est passée au bleu. “Passer au bleu” est une expression provenant du temps où l’on utilisait dans les blanchisseries le bleu en liqueur, un mélange d’indigo et d’acide sulfurique qui permettait de rendre le linge blanc plus blanc. Au sens figuré cette expression est synonyme d’oublier, ou effacer. C’est ce qui est arrivé à ces deux arbres. Ils sont bloqués entre deux états, entre oubli et héritage, selon le temps qu’il fait.

La presse en parle

LA DEPECHE

Moulins remarquables du Gers : Moussaron, l’unique, là-haut sur sa colline, vigie historique de Condom

    

PatrimoineGersCondom

Publié le 02/11/2025 à 07:25

J.R.

l’essentielÉdifice tour muni d’ailes Berton et de tout son mécanisme, le moulin de Mousaron domine la cité condomoise. Il est le fruit d’une restauration passionnée. Inspirant, il vient encore d’accueillir une installation d’art contemporain au printemps dernier.

À leur voir isolé, seul sur son coteau, au lieu-dit Pomaro, difficile d’imaginer que le moulin de Moussaron fut au centre d’une intense activité. Et pourtant, en son temps, ce ne sont pas moins de 17 fermes voisines qui voyaient leur production de blé moulue ici.

 

Insolite, le moulin a su inspirer les artistes invités par les Chemins d’art en Armagnac CAA

Mais par un acte d’afferme conclus à Flaran le 18 juin 1633 incluant des travaux, on apprend que « des meules seront transportées de Moussaron à Flaran ». On pourrait donc ne plus rien en deviner aujourd’hui.

 

La renaissance grâce à un passionné

Car dressé bien avant le XVIIe siècle, le moulin a plusieurs fois changé de mains et passé par l’état de ruine, avant qu’un passionné n’en fasse l’acquisition en 1956 « Quand j’ai racheté la maison de Moussaron en 1970, il a fallu y faire de grosses réparations. Elles ont duré 25 ans. Pendant ce temps, le moulin était resté une ruine », racontait André Doazan. « Il ne restait plus qu’une tour et deux poutres. Mais au lieu de le démolir, je me suis dit : pourquoi ne pas le refaire ? »

À lire aussi : « À chaque fois, on se fait dévaliser »: boulangers et bénévoles fabriquent du pain à partir d’un moulin à vent gersois ressuscité

Comme il l’expliquait à nos collègues de « La Dépêche du Midi » il y a 20 ans, c’est finalement avec l’aide d’Antoine Bragagnolo, artisan-menuisier condomois, au gré d’un véritable périple qui débute en 1996, qu’André Doazan, le fils, envisage la restauration et, pour ce faire, va visiter des moulins, comme ceux du Lot-et-Garonne. Il étudie des rapports sur leur restauration.

Mais c’est en… Maine-et-Loire, au Nord d’Angers, que le passionné fait une rencontre déterminante : « J’ai trouvé une entreprise spécialisée dans la réparation des moulins. Grâce à ses conseils, de nombreuses pièces sont achetées. » André Doazan ne peut pas compter, il est vrai, sur la mémoire des locaux : « Voici 30 ans, j’ai demandé à des octogénaires de l’époque s’ils l’avaient déjà vu tourner. Personne ne s’en souvenait. C’est normal : les moulins du Sud-ouest n’ont plus été utilisés à partir de 1800 ou 1850 », expliquait alors le sauveur du moulin de Moussaron.

Quelques documents témoignent de l’aspect des moulins gersois d’antan. DR

Il restaure entièrement le moulin et le dote des ailes Berton, permettant ainsi une remise en marche. Les deux restaurateurs condomois montent vite un atelier au pied de la bâtisse. Ils ramèneront du Lot une pièce pour régler le débit du grain, tout en se procurant des engrenages de plusieurs siècles. L’hélice et l’axe principal sont tour à tour produits à partir de chênes et cèdres multicentenaires du site de Moussaron.

Même l’escalier de pierre – « construit à gauche, car les meuniers portaient les sacs sur leur épaule droite » – est fidèlement restauré. « Les travaux ont duré six mois, jusqu’à ce qu’une grue ne place l’étage en bois au-dessus de la tour de pierre… » André Doazan avouait moudre du blé une fois par an. Histoire de redonner vie à un engin toujours apte à produire ses deux tonnes de farine par jour.

Désormais, c’est ponctuellement que le moulin est réveillé par des animations qui se tiennent à ses pieds. Ainsi en novembre 2020 où son site se transforme en camp militaire provisoire pour un escadron de détection et de contrôle mobile de la base aérienne 705 de Tours.

Le moulin s’est retrouvé plongé au cœur d’un camp militaire provisoire. M.L-S.

Il est ainsi aux premières loges pour apprécier le travail des militaires d’une unité unique, capable de mener des opérations aériennes et de les coordonner avec des forces au sol, notamment lors d’opérations extérieures au territoire national.

L’art contemporain au pied du moulin

Plus récemment, au printemps dernier, ce sont des artistes qui ont investi les abords du moulin. Pour son exposition d’art contemporain, l’association des Chemins d’art en Armagnac invite en effet chaque année peintres, sculpteur et performeurs à créer une œuvre depuis un lieu marquant du patrimoine local.

Le moulin de Moussaron a pu être redécouvert ce printemps à l’occasion de l’exposition des Chemins d’art en Armagnac. CCA

Sur le thème de « Entrelacs et ritournelles », deux artistes venus de Belgique viennent y chercher l’inspiration. Sarah Illouz et Marius Escande investissent le site. L’espace extérieur et les arbres morts du château du Luc leur donnent des idées (et des ailes) qu’ils abordent avec jubilation. Leur projet fait écho tant à la situation topographique du moulin, marqueur du paysage, qu’à sa dimension métaphorique, pointant vers le ciel ses ailes aujourd’hui vaines disant l’oubli d’un monde.

Deux pins secs sur pied montent la garde au Moulin de Moussaron. Ils ont été délicatement coupés afin d’être replantés de part et d’autre du moulin. La mort des arbres est passée au bleu. « Passer au bleu » est une expression qui au sens figuré est synonyme d’oublier, ou effacer. C’est ce qui est arrivé un temps au moulin de Moussaron.

Pour l’heure, il dresse néanmoins fièrement ses grandes ailes sous le ciel gersois.